La gauche complotiste reprend ses vieilles habitudes... qu’elle n’avait jamais abandonnées depuis la parution du livre du fouriériste ("socialiste utopique", de "gauche" donc) Alphonse Toussenel : "Les Juifs, rois de l’époque. Histoire de la féodalité financière" (1847).
En période d’élection présidentielle (en France) ou d’agression russe (en Ukraine) les Juifs sont des boucs émissaires de choix pour la gauche, qui est incapable de mobiliser les travailleurs sur quoi que ce soit. La lutte de classe, c’est fini pour les sociaux patriotes et les pseudo radicaux, en avant vers la démagogie antijuive pour racoler des voix ou pour cacher son impuissance à aider les prolétaires ukrainiens !
Donc cette gauche kitsch aboie dans ses publications en faisant la retape pour Mélenchon, en évitant de condamner clairement l’agression russe, ou en noyant le poisson dans une rhétorique "antifasciste" et/ou "anti-impérialiste".
En France "Le Média TV", organe de propagande des sociaux-patriotes de la "France insoumise" consacre quasiment une heure à ce qu’il appelle un "Rothschildgate" et reprend l’info dans sa pseudo "Contrematinale". (Les auteurs de ce reportage ont évidemment lancé un hashtag sur Twitter, et ce thème du "Rothschildgate" a été repris par Zemmour, Philippot, les LR, L’Humanité, Le Parisien, etc. Bref l’union nationale se réalise contre les "Les Juifs rois de l’époque" comme au XIXe siècle.)
Et nos journaleux indignés d’égrener une bonne vingtaine de fois le nom magique "Rothschild" pour nous expliquer que, en France, cette banque d’affaires internationale contrôlerait tous les gouvernements depuis au moins Pompidou. En clair les Juifs contrôlent la France. Mélenchon n’avait-il pas déjà ouvert la voie, en attaquant son ancien compère Fabius puis récemment Zemmour de façon fort ambiguë ?
Pas un mot bien sûr, dans Le Média, contre les banquiers ou patrons bien plus puissants que les mythiques Rothschild mais que ces journalistes besogneux ne peuvent rattacher aux "Juifs".
Ca, c’est pour le côté gauche social-chauvine.
La gauche intello pseudo rrrrradicale a trouvé, elle, une autre cible : Volomoïski un capitaliste ("juif" souligne Lundi matin) qui finance et le président Zelensky ("juif" souligne Lundi matin) et un bataillon néonazi en Ukraine.
Cette gauche "antifasciste" et "antiraciste" qui ne s’est jamais mobilisée contre les assassinats de Juifs en France (d’Ilan Halimi en 2006 jusqu’à Mireille Knoll en 2018, en passant par les assassinats de trois enfants et d’un adulte à Toulouse en 2012 dans une école juive, ou les quatre meurtres de l’Hypercasher en 2015) a trouvé deux cibles juives pour attiser ses passions morbides : un capitaliste (Volomoïski) et un politicien réactionnaire (Zelensky), tous deux "juifs" selon nos grands Rrrrévolutionnaires.
Et cette prose écœurante est reprise par un site libertaire "A contretemps" qu’on a connu mieux inspiré, même si son adoration pour l’ex-stalinien et toujours social-patriote Jean-Claude Michéa présageait déjà le pire.
Décidément, oui, il est temps de dire un "De profundis pour la gauche" comme l’écrit João Bernardo (http://npnf.eu/spip.php?article910 )
Y.C., Ni patrie ni frontières, 31 mars 2022