Ce témoignage sincère, et modeste, nous est offert par un homme qui a adhéré au BPP à 16 ans en 1968 où il a milité jusqu’en 1977, année où il est entré dans la clandestinité suite à une tentative d’assassinat afin d’aider Huey P. Newton à ne pas être condamné pour le meurtre d’une prostituée.
D’origine ouvrière, tant du côté paternel que maternel, Forbes grandit à San Bernardino, dans un quartier qui ne correspond pas du tout aux clichés sur le « ghetto » : très peu de mères célibataires, tout le monde a un boulot, pas de délinquance, etc. Cela s’explique sans doute par le fait que la population afro-américaine locale était à l’époque employée essentiellement dans l’armée, la marine, ou dans des entreprises dépendant de ces deux institutions, et que, malgré les discriminations sévissant sur le marché du travail, il n’y avait pas de chômage.
Arrêté à l’âge de 12 ans pour un vol de bicyclette qu’il n’a pas commis, tabassé par les flics à 14 ans et sauvé de justesse par un flic afro-américain qui connaît ses parents, sa révolte commence contre le racisme policier commence donc très jeune. Son père est un homme très strict et travailleur : responsable d’un groupe de boy-scouts et entraîneur bénévole de baseball, il va jusqu’à cumuler trois boulots différents en même temps quand il sort de la marine, au bout de 20 ans de service : barman dans un club, domestique d’un amiral et homme de ménage dans une usine. Sa mère travaille comme femme de ménage puis comme infirmière. La plupart des écoles sont « intégrées » et ne pratiquent pas la ségrégation à San Bernardino.
A seize ans, en 1968, Forbes abandonne ses études et doit donc travailler pour avoir le droit de rester vivre avec ses parents. Son frère lui fait découvrir l’Autobiographie de Malcolm X, Les damnés de la terre et Peau noire, masques blancs de Frantz Fanon mais aussi le journal du BPP. « Pour la première fois de ma vie, écrit-il, je me passionnais pour autre chose que les filles et la fumette. » Il est fasciné par l’uniforme des Panthères noires, leur blouson et leur béret, mais ne s’imagine pas que cet engouement va devenir un engagement durable. Il se rend à des séances d’éducation politique avec son frère où le formateur du BPP leur explique que le Petit Livre Rouge est « sa bible » et où il côtoie des jeunes qui savent à peine lire, les fameux « lumpen-prolétaires » dont Huey P. Newton et Eldridge Cleaver prétendent qu’ils sont « l’avant-garde de la révolution » à venir.
Forbes travaille sur la base navale de San Diego, et, après le boulot, vend le journal des Panthères noirs, participe à la campagne pour la libération de Huey Newton en 1967-1968, voit pour la première fois des dirigeants comme David et June Hilliard, John Seale, Emory Douglass et Ericka Huggins.
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3. Paul Alkebulan, "Survival pending revolution, The history of the Black Panther Party", University of Alabama Press, 2007
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4. A propos de "Will you die with me ?" de Flores Alexander Forbes, Washington Square Press, 2006
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5. Elaine Brown, "A taste of power". A black woman’s story, Pantheon, 1992
6. Evans D. Hopkins, "Life after life. A story of rage and redemption", Free Press, 2005
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7. « The Collective Autobiography of the New York 21 », réédité dans Look for me in the Whirlwin
8. « The Black Panther Party. Service to the people programs »
9. Chronologie du Black Panther Party
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