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Ni patrie ni frontières
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Que se cache-t-il derrière le slogan de la« destruction d’Israël » ?
Article mis en ligne le 8 mai 2017

Si l’on prend au sérieux ceux qui prônent la « destruction de l’Etat d’Israël », il faut envisager concrètement à quoi cela pourrait mener.
Je vois pour ma part 5 possibilités :

a) Un « gouvernement ouvrier et paysan » s’appuyant sur des « milices ouvrières et paysannes », juives et palestiniennes (on serait alors dans une dynamique « transitoire » et pré-révolutionnaire, inspirée du Programme de transition de Trotsky).

b) Une révolution socialiste : il ne s’agit alors pas seulement de détruire l’Etat sioniste mais aussi les Etats libanais, jordanien et syrien, pour ne parler que des plus proches.
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c) Un Etat laïc binational, respectant les droits des minorités, religieuses ou ethniques, quelles qu’elles soient. En clair : il s’agit de démocratiser Israël et de faire une sorte de Grande Palestine, mais avec les deux peuples. L’Etat sioniste actuel fusionnant avec l’Autorité palestinienne, au détriment des projets intégristes, juif-sioniste et musulman.

d) Une République palestinienne qui respecterait les droits démocratiques des Juifs en tant que minorité ethnique-religieuse. L’Autorité palestinienne prendrait alors la place de l’Etat sioniste. Pour cela, il faudrait qu’Arafat respecte déjà les droits de l’homme dans son propre territoire, coupe tous liens politiques avec les intégristes et tous liens financiers avec les États arabes qui ont financé l’OLP pendant des dizaines d’années. Vaste programme…

e) Sinon, et c’est malheureusement le plus probable, la « destruction de l’Etat sioniste » signifie exiler tous les Juifs comme les Pieds noirs d’Algérie, les colons portugais d’Afrique, etc. C’est d’ailleurs ce qu’un trotskyste a fini par m’avouer : les Juifs, « s’ils ne sont pas prêts à perdre leurs privilèges » devront quitter Israël/Palestine. Cela avait le mérite de la clarté… Un militant d’une organisation concurrente m’a écrit ne « pas savoir si l’Autorité palestinienne respecterait totalement les droits démocratiques des Juifs ». En clair, il leur propose de jouer à la roulette russe…
Le problème avec les « antisionistes » c’est qu’ils précisent rarement dans quelle perspective ils militent à court, à moyen et à long terme. S’ils le faisaient, cela permettrait peut-être de discuter plus sereinement. Mais, en réalité, ne raisonnent-ils pas en fonction d’une théorie de la « révolution par étapes » ? Ils consacrent l’essentiel de leur propagande à parler de la première phase (la destruction de l’Etat d’Israël), ce qui leur permet, entre autres, d’espérer avoir l’oreille des jeunes immigrés, ou enfants d’immigrés, révoltés par les crimes de l’armée israélienne en Palestine. Quant aux étapes suivantes, eh bien, ils commenceront à parler de révolution socialiste quand les flics ou les soldats de l’OLP se retourneront contre leur propre peuple…
Aucune des cinq possibilités évoquées plus haut n’étant très réaliste dans l’immédiat, il me semble préférable d’avancer le mot d’ordre « Deux peuples, deux États ». En effet, combien existe-t-il d’Etats laïcs au Proche et au Moyen-Orient ? Quel est le rapport de forces sur le terrain entre le Djihad et le Hamas, d’un côté, et les laïcs palestiniens ? Quels sont les Etats arabes qui financent le Djihad et le Hamas ? Pourquoi l’Arabie saoudite et les Etats du Golfe, sans compter l’Iran ou la Syrie, s’arrêteraient-ils de jouer la carte antisémite et anti-israélienne ?
De quelle façon Arafat traite-t-il les organisations des droits de l’homme palestiniennes ?
On a déjà des éléments de réponse en observant ce qui se passe aujourd’hui. L’Autorité palestinienne est une administration pourrie par la corruption, les chefs de l’OLP se construisent de belles villas, la police palestinienne interdit toute critique d’Arafat, etc. Donc les Juifs israéliens n’ont aucune envie de vivre sous l’autorité de cette bande-là. Ils n’aiment pas Sharon mais au moins ce salaurd a été élu par la majorité des citoyens israéliens. Le peuple juif a le droit de décider s’il veut vivre sous l’autorité d’Arafat… ou de Sharon.
Dernier point : l’importance du facteur religieux des deux côtés de la barricade. Si les Juifs ont choisi la Palestine et pas l’Argentine, c’est pour des raisons religieuses, y compris les sionistes athées ont joué de fait sur cette référence. Et le dernier gouvernement formé en Israël montre bien que même les prétendus laïcs du Shinoui qui sont arrivés devant les travaillistes sont prêts à gouverner avec les extrémistes religieux les plus intégristes.
La prudence m’incite à considérer que des peuples dont le conflit est alimenté (en plus des questions ethniques, nationales, économiques, géopolitiques, sociales, etc.) par des idéologies religieuses antagonistes ne peuvent pas vivre sur le même territoire, comme l’ont montré et le montrent l’histoire d’Israël et celle de l’Islam.
(Y.C.)