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Le Parti pour la liberté (PVV) de Geert Wilders : un parti antisocial et néolibéral (2009)
Article mis en ligne le 29 novembre 2023

Le Partij van de Vrijheid (Parti pour la liberté) [1] de Geert Wilders est à juste titre attaqué pour ses positions racistes et nationalistes, car ce sont là ses idées les plus marquantes. Sur le plan socio-économique, ces populistes de droite défendent un mélange d’attitudes néolibérales et conservatrices, principalement dans l’intérêt de la classe moyenne et des entreprises. Cet article évoque les idées et les actions du PVV.

Wilders a de nouveau prouvé sa réputation de politicien du spectacle à la fin du mois de mars 2009 lors d’un débat au parlement sur la crise économique. Lorsque les partis en place, CDA [2], PvdA (Parti du travail) [3] et ChristenUnie [4] ont présenté leurs mesures de lutte contre la crise au parlement, tous les représentants du PVV ont quitté la salle. Wilders sait comment exploiter le manque de démocratie au sein du système parlementaire, dont il fait partie depuis de nombreuses années, pour se présenter comme l’outsider. De façon récurrente il dénonce « l’élite politique de La Haye » avec son énorme bureaucratie et la société multiculturelle qui aurait ouvert la porte aux « terroristes de rue marocains » et aux « colonisateurs islamiques ».

Comme cela s’est déjà produit par le passé, la sortie de Wilders et de ses collègues a suscité un tollé de la part d’autres politiciens parlementaires qui se sont vus voler leur propre spectacle. L’incident a également suscité une vague d’attention de la part des médias. Wilders emploie une tactique très au point pour créer des scandales qui lui permettent de se présenter comme le protecteur du « citoyen lambda ». Différentes enquêtes ont montré le succès de sa méthode. Mais on s’intéresse rarement au contenu de ses propositions.

Marché libre

Le programme économique du Parti pour la liberté est néolibéral. Selon les néolibéraux, l’économie doit être régie par le « marché libre de l’offre et de la demande » dans la mesure du possible. Les néolibéraux sont opposés à la régulation de l’économie par l’État. Les entreprises publiques telles que les transports publics et les services postaux doivent être privatisés autant que possible. Wilders veut un État modeste qui intervienne un minimum dans l’économie. Selon lui, la croissance économique « résulte d’impôts faibles, de réglementations minimales et de la présence d’établissements d’enseignement de haute qualité ». Il veut réduire de deux tiers le budget du ministère de l’Économie et souhaite supprimer la moitié des lois et règlements existants.

Le citoyen que Wilders prétend défendre aura beaucoup à perdre si cet individu accède au pouvoir car il veut se débarrasser d’un grand nombre de lois qui protègent les travailleurs. Or, ces lois affectent la position des patrons et donc la « liberté » du marché. Quand il était député du VVD (Parti populaire pour la liberté et la démocratie) [5], Wilders avait proposé d’exclure les syndicats, estimant qu’ils ne représentaient qu’une trop petite partie de la population active. Maintenant qu’il dirige le PVV, il promet de révoquer le statut juridiquement contraignant des CAO, c’est-à-dire des conventions collectives [6].

La défense du « citoyen lambda » n’est rien d’autre qu’une rhétorique populiste creuse qui dénonce les grosses primes et les impôts élevés. « Des impôts faibles et un Etat modeste » seraient « la meilleure garantie de croissance économique ». Le Parti pour la liberté semble favoriser principalement les patrons, les personnes touchant des revenus confortables et celles bénéficiant des revenus les plus élevés. Si l’on diminue les impôts sur les salaires et sur les revenus, le PVV affirme que tout le monde en bénéficiera. Mais ceux qui ont un revenu élevé en profiteront beaucoup plus que ceux qui ont une rémunération plus faible, ce qui est exactement ce que veut le parti. À long terme, la réduction des impôts signifierait l’introduction d’un taux d’imposition forfaitaire. Au lieu d’augmenter les impôts des riches, le PVV veut que tout le monde paie selon le même taux d’imposition. Cela signifie que, proportionnellement, les riches paieront moins et les pauvres plus.

Les néolibéraux purs et durs sont absolument opposés à l’intervention de l’État, mais le Parti pour la liberté met cela en balance avec « l’intérêt national ». Lors du débat sur la crise, ce parti a proposé de donner 400 euros à chaque adulte, en guise de cadeau unique. Avec cet argent, la demande de biens de consommation serait stimulée, ce qui donnerait un coup de fouet à l’économie. Le PVV tente d’attirer les gens en leur offrant des pots-de-vin, alors que la crise a frappé durement et affecte des millions de personnes dans le monde entier. Bien que Wilders ait dénoncé les primes élevées des grands patrons, ces derniers recevraient également ces 400 euros. Ces acrobaties n’aideraient pas les nombreuses personnes touchées par la crise et les « citoyens lambda » qui ont perdu leur emploi ne retrouveraient pas de travail grâce à ces mesures symboliques.

Avec la libéralisation du service postal, le PVV a choisi un point de vue conservateur et nationaliste malgré sa position néo-libérale. Depuis le 1er avril 2009, d’autres entreprises que la TNT [7] sont autorisées à distribuer du courrier privé. Cela permet aux patrons de la TNT de restructurer leur entreprise. Cela ne signifie rien d’autre qu’une réduction des salaires. Lors d’un débat parlementaire sur ce sujet, le PVV a affirmé qu’il défendait les postiers menacés par ces réductions. Les patrons de la TNT ont menacé de procéder à des licenciements massifs si les facteurs n’acceptaient pas une réduction de salaire de 15 %. En réponse à cette menace, un député du SP (Parti « socialiste », hostile à l’immigration), Sharon Gesthuizen, a proposé de garantir un salaire minimum aux facteurs. Cette proposition a été rejetée par tous les partis en place, y compris le VVD (Parti populaire pour la liberté et la démocratie) et, bien sûr, le PVV. La proposition de Dion Grauss, député du PVV, montre que le parti était surtout préoccupé par la position concurrentielle de la TNT néerlandaise sur le marché plutôt que par la dégradation des droits des travailleurs.

« Désislamisation »

Dans le domaine de la protection sociale, le programme du PVV est conservateur et exige davantage d’intervention de la part de l’État. Les personnes bénéficiant d’une aide publique devront travailler pour obtenir leurs allocations. Leur montant devrait être réduit, car selon le PVV, la différence avec le salaire minimum est si faible que les allocataires ne seraient pas motivés pour commencer à travailler. Le parti souhaite supprimer les allocations aux personnes qui ne montrent pas suffisamment leur volonté de travailler. Ensuite, ces personnes seraient laissées à elles-mêmes. Wilders s’efforce de créer un État fort qui, si nécessaire, déploiera l’armée pour maintenir l’ordre, la discipline et la décence. Il préconise une répression sévère, des peines minimales et des peines plus sévères que celles qui sont actuellement appliquées. La possibilité de bénéficier d’une libération anticipée devrait également être supprimée.

Selon le PVV, la santé est l’un des principaux points de sa politique sociale. Le parti cite régulièrement des exemples de défaillances du système de santé, comme la pénurie de travailleurs qualifiés pour la prise en charge des personnes âgées, qui se traduit par une baisse de la qualité des soins. Dans cette situation, le PVV cherche une fois de plus des solutions en diminuant la bureaucratie : plus de petites mains et moins de cadres. Le PVV critique également les bas salaires des travailleurs et le manque de considération dont ils sont victimes. Le Parti pour la liberté souhaite que l’Etat investisse plus d’argent dans leurs rémunérations.

A première vue, ces propositions ne semblent pas si mauvaises que cela. Mais le discours du PVV ne s’arrête pas là. « Ce sont les droits pour lesquels nos citoyens âgés se sont battus avec leur sang, leur sueur et leurs larmes après avoir construit ce pays sur les ruines de la Seconde Guerre mondiale, déclare le PVV. Ils ont élevé leurs enfants et ont payé des sommes incroyables à l’État qui les a dilapidés, et ils ont payé les factures pour l’idéal de la société multiculturelle ». Selon le PVV, les « allochtones » [8] sont la cause de l’incapacité du système de santé à prendre en charge les personnes âgées. Ce ne sont pas les privatisations et les coupes continues dans le budget de la santé au détriment des pauvres, mais « les musulmans » qui sont la cause du problème. Ils exerceraient une telle pression sur le système de santé que « nos » aînés « autochtones » [9] dépériraient dans les maisons de retraite.

Le PVV préconise sérieusement la « désislamisation » du système de santé, parce que : « Henk et Ria paient pour Ali et Fatima ». Selon la nouvelle conception raciste de la division de la société, les « allochtones » et les « autochtones » ne veulent pas prendre soin les unes des autres. « Le musulman âgé qui nécessite des soins est très exigeant et a coûté beaucoup d’argent à la société. » Non seulement les musulmans sont des boucs émissaires, mais les « clandestins » [10] et les personnes non assurées sont également stigmatisés par le PVV. Ils ne paient pas d’assurance maladie et, de ce fait, les « autochtones » doivent débourser une somme plus importante. « En fin de compte, le fait que ces gens-là ne paient pas implique que les personnes à faible revenu déboursent davantage. Si un groupe de personnes ne paie pas ses soins de santé, le montant nominal augmente. » La situation précaire des personnes à faible revenu est utilisée pour justifier les absurdités racistes et l’opportunisme du PVV.

Environnement

Le Parti pour la liberté souhaite que l’on investisse plus d’argent dans l’environnement, mais il veut que cet argent serve à détériorer la nature. Le parti souhaite investir dans les routes et les autoroutes. Ses propositions incluent la construction d’un deuxième aéroport national dans la région de Flevopolder ou dans la mer, ainsi que la construction de nouvelles centrales nucléaires. Avec le slogan « Van Groene Hart naar Kloppend Hart » (Du cœur vert au cœur battant), le parti souhaite sacrifier les dernières zones vertes de la région de Randstad [11].

Tout comme la crise économique, la crise environnementale rampante constitue un grave danger. Malgré cela, le PVV refuse de soutenir des mesures qui pourraient affecter les entreprises. Barry Madlener, député du PVV, a présenté une résolution au Parlement contre les accords européens visant à réduire les émissions de CO2, parce qu’ils seraient préjudiciables aux entreprises. Les émissions de CO2 ? « Elles ne posent pas de problème ! Elles permettent aux plantes de pousser très bien », selon le grand « amoureux de la nature » qu’est Barry Madlener.

Dans une autre résolution, il dénonce les accords sur la qualité de l’air et sur la santé publique, parce qu’ils affecteraient la mobilité des automobilistes. Le député du PVV Dion Graus s’est également fait entendre dans ce débat. Il a présenté une résolution contre les subventions à la construction d’éoliennes qui produisent de l’électricité. En juillet 2007, un niveau historiquement bas a été atteint lorsque les députés Bosma et Madlener du PVV ont posé des questions au ministre de l’Éducation, de la Culture et des Sciences et au ministre du Logement, de l’Aménagement du Territoire et de la Gestion de l’environnement concernant « la vague de propagande en faveur du prétendu changement climatique diffusée par les radios publiques ». Le PVV nie catégoriquement que le climat change en raison des gigantesques émissions de CO2.

L’argent nécessaire à l’amélioration du système de santé, à la construction de nouvelles routes, à la réduction des impôts et à l’aumône anticrise de 400 euros doit provenir d’une réduction des dépenses publiques. Selon le PVV, le gouvernement « de gauche » de Balkenende dispose d’un « budget de dingue » dans lequel chaque « dada de gauche » donne droit à une « subvention de dingue ». Selon le parti, le gouvernement peut réduire massivement ces dépenses. Ses exemples concernent, par exemple ,l’aide au développement, l’Union européenne, l’immigration, la « folie climatique », les groupes qui défendent des causes militantes, les radios publiques, la société multiculturelle, les filtres des pots d’échappement, les avions de combat interarmées, la guerre en Afghanistan, les artistes subventionnés, les « quartiers Vogelaar » [12], les Antilles néerlandaises, les politiques de réinsertion, « toutes sortes de règles et de privilèges » (c’est-à-dire les « acquis » d’années de lutte syndicale) et, ne l’oublions pas, « les super chouchous de la gauche néerlandaise : les allochtones ».

Sandor Schmits

Notes

1. Le PVV, Partij voor de Vrijheid (Parti pour la liberté), est un parti d’extrême droite aux Pays-Bas qui mélange des idées conservatrices et néolibérales. Il se focalise surtout sur la lutte contre le prétendu « problème de l’immigration » et sur l’islam.

2. Le CDA (Christen Democratisch Appel, Appel chrétien-démocrate) est un parti de centre- droit. Il défend des idées conservatrices (chrétiennes) et un programme économique protectionniste, ce qui résulte de la forte présence des agriculteurs au sein de ce parti.

3. Le Partij van de Arbeid (PVDA), Parti du travail, parti social-démocrate, à l’origine de la conquête de nombreux droits sociaux. Au cours des vingt dernières années, il s’est surtout efforcé de les démanteler et est devenu un parti de centre-gauche qui souhaite introduire « en douceur » des réformes néolibérales.

4. Christenunie (CU), Union chrétienne, est issue de l’union entre différents partis chrétiens qui défendent un programme conservateur, notamment sur l’avortement et l’homosexualité, mais veulent apparaître un peu plus « progressistes » dans le domaine social (défense de la Sécurité sociale et protection de l’environnement).

5. Le VVD, Volkspartij voor de Vrijheid en Democratie (Parti populaire pour la liberté et la démocratie), est un parti néolibéral issu de la tradition capitaliste libérale. Il insiste surtout sur les droits des individus et les libertés. Il souhaite que le gouvernement intervienne le moins possible dans la vie des gens et respecte les règles du « libre marché ».

6. CAO, Collectieve Arbeidsovereenkomst (conventions collectives). Aux Pays-Bas, ces accords ont un statut juridiquement contraignant pour tous les travailleurs d’un certain secteur d’activité et ils fixent le montant des salaires ainsi que les règles relatives aux conditions de travail et aux congés.

7. Issue de la privatisation des services publics, la TNT est la plus grande entreprise postale des Pays-Bas.

8. Allochtonen : terme utilisé généralement pour décrire les personnes « qui ne sont pas d’ici », les immigrés, les réfugiés et les étrangers.

9. Autochtonen : mot utilisé généralement pour décrire les personnes « qui sont d’ici », les Néerlandais « de souche » qui résident aux Pays-Bas.

10. Il est important de noter que, selon la loi néerlandaise, une personne résidant illégalement aux Pays-Bas n’est pas autorisée à avoir une assurance maladie.

11. Randstad : zone densément peuplée située entre les villes de Rotterdam, La Haye, Amsterdam et Utrecht. Une partie de cette région abrite encore beaucoup de paysages verts, de lacs et de petites forêts. C’est pourquoi on l’appelle « het Groene Hart » (le cœur vert).

12. Ces quartiers sont surnommés ainsi en raison de l’ancienne ministre de l’Habitat, des Quartiers et de l’Intégration, Ella Vogelaar, qui publia, en 2007, une liste de 40 « zones défavorisées », semblables aux « zones urbaines sensibles » (ZUS) en France. Ces quartiers reçurent des subventions importantes destinées à y améliorer les conditions de vie.

AUTRES ARTICLES SUR WILDERS ET LE PVV

– Geert Wilders, un politicien populiste et d’extrême droite (2005)
https://npnf.eu/spip.php?article412

– Qui est vraiment Geert Wilders ? (2007) https://npnf.eu/spip.php?article1117

– Même les universitaires qualifient le Parti pour la liberté de Wilders d’extrême droite (2008) https://npnf.eu/spip.php?article1118

– Le Parti pour la liberté (PVV) : un parti antisocial et néolibéral (2009)

– Qui vote pour le Parti pour la liberté (PVV) ? (2009) https://npnf.eu/spip.php?article1120

– Le manifeste électoral du Parti pour la liberté (PVV) est plus raciste que celui du NSDAP d’Hitler dans les années 1920 (août 2016)

  Desintox : malheureusement les électeurs néerlandais n’ont PAS rejeté Geert Wilders (mars 2017) https://npnf.eu/spip.php?article1119

– Les Pays-Bas étaient déjà d’extrême droite, mais désormais on ne peut plus l’ignorer (2023) https://npnf.eu/spip.php?article1116