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Ni patrie ni frontières
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A propos de "Le remplaçant : journal d’un prof précaire de banlieue" de Nedjib Sidi Moussa
Editions L’Echappée, 18 euros
Article mis en ligne le 22 octobre 2023

Cet ouvrage est un OLNI, un Objet Littéraire Non Identifié.

En effet, c’est à la fois un journal intime ; l’évocation de quelques souvenirs d’un ex-militant d’extrême gauche (mais toujours partisan d’une révolution sociale) ; un réquisitoire contre les mœurs de la vie universitaire et intellectuelle ; et, last but not least, la description minutieuse, mais non pédante, de la vie quotidienne d’un prof remplaçant qui vit et travaille « en banlieue », voire dans trois banlieues puisque l’Éducation nationale est incapable de lui fournir un poste à temps complet dans un seul établissement et qu’évidemment il n’habite pas en face des collèges où il est affecté.

La partie journal intime dresse un autoportrait pas trop narcissique, mais on a parfois envie que l’auteur sorte de sa réserve et nous en dise un peu plus sur lui-même, avec le sens de l’humour et de l’autodérision qui est sa marque de fabrique sur Facebook et dans ce livre.

Pour ce qui concerne ses allusions à son passage dans les rangs d’un groupe trotskiste, idem, on reste sur sa faim, même si les curieux pourront en apprendre un peu plus dans un témoignage publié sur Internet (https://acontretemps.org/spip.php?article914 ).

Quant à la description féroce du petit milieu universitaire dans lequel l’auteur n’a jamais été « intégré » (dans tous les sens du terme), il est dommage qu’elle ne soit pas plus développée, même si, réflexion faite, nous n’avons guère envie d’en apprendre davantage, à moins d’être d’incorrigibles masochistes ou déclinistes.

Passons au plat de résistance, qui représente l’essentiel du contenu de ce livre et qui lui donne son titre : « Le remplaçant : journal d’un prof précaire de banlieue  ». La lecture en est à la fois drôle et désespérante, instructive et déprimante. A travers de nombreuses anecdotes et vignettes, parfois d’une demi-page, l’auteur nous fait découvrir (en tout cas à ceux dont les enfants ou l’entourage familial ne connaissent pas cette réalité) les pulsions, les réflexions intelligentes, les blagues stupides, les références culturelles variées, les comportements de quelques dizaines de filles et de garçons des classes populaires. Nedjib Sidi Moussa, même s’il décrit souvent des moments de tension ou d’incompréhension réciproque, sait aussi nous faire partager des moments de bonheur dans ses classes si diverses et si agitées.

Personnellement, je n’ai pas acheté ce livre parce que je m’intéresse particulièrement aux problèmes des enseignants, fussent-ils précaires. C’est plutôt le côté « tranche de vie » d’un professeur révolté mais drôle (cf. sa page Facebook) qui m’a décidé à le lire. Et si c’est ce qui vous motive, vous ne serez pas déçus… et déçues. Même si, comme moi, vous détestez les montagnes russes, ce livre vous secouera, que vous vous identifiez au prof ou à ses élèves….

Yves Coleman, Ni patrie ni frontières, 20 octobre 2023