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Amsterdam, 13 avril 2002 : la plus grande manifestation antisémite depuis 1945

Le 13 avril 2002, 15 000 personnes ont manifesté à Amsterdam contre Israël. La manifestation avait un caractère antisémite prononcé et s’est produite à un moment où l’antisémitisme croît en Europe.
Lorsque la manifestation a atteint le Dam, place centrale à Amsterdam, les manifestants ont commencé à crier : « Un Juif, il y a un Juif ! » En masse, des gens se sont précipités sur un passant qui portait une kippa. Ils l’ont attrapé et jeté par terre. « Je me suis protégé la tête avec les bras et me suis senti totalement impuissant, a-t-il raconté plus tard. Ils m’ont cogné dans les côtes, dans le ventre et ont frappé mes jambes de tous les côtés, en continuant à pousser des cris hystériques. J’ai vraiment cru qu’ils allaient me tuer. Beaucoup de manifestants ont assisté à la scène mais personne n’est intervenu, pas plus que les policiers anti-émeute. » Cet homme a finalement été sauvé par deux jeunes Juifs qui ont réussi à le dégager de ses assaillants en le traînant à l’intérieur de l’Hôtel Krasnapolsky, sous une pluie de pierres, de bouteilles et même de bicyclettes. Après cela, les manifestants ont essayé d’attaquer l’hôtel et lancé des briques dans les fenêtres.

Article mis en ligne le 8 mai 2017

De Fabel van de illegaal, été 2002

Le 13 avril 2002, 15 000 personnes ont manifesté à Amsterdam contre Israël. La manifestation avait un caractère antisémite prononcé et s’est produite à un moment où l’antisémitisme croît en Europe.
Lorsque la manifestation a atteint le Dam, place centrale à Amsterdam, les manifestants ont commencé à crier : « Un Juif, il y a un Juif ! » En masse, des gens se sont précipités sur un passant qui portait une kippa. Ils l’ont attrapé et jeté par terre. « Je me suis protégé la tête avec les bras et me suis senti totalement impuissant, a-t-il raconté plus tard. Ils m’ont cogné dans les côtes, dans le ventre et ont frappé mes jambes de tous les côtés, en continuant à pousser des cris hystériques. J’ai vraiment cru qu’ils allaient me tuer. Beaucoup de manifestants ont assisté à la scène mais personne n’est intervenu, pas plus que les policiers anti-émeute. » Cet homme a finalement été sauvé par deux jeunes Juifs qui ont réussi à le dégager de ses assaillants en le traînant à l’intérieur de l’Hôtel Krasnapolsky, sous une pluie de pierres, de bouteilles et même de bicyclettes. Après cela, les manifestants ont essayé d’attaquer l’hôtel et lancé des briques dans les fenêtres.
C’est ainsi que s’est terminée la plus grande manifestation en Hollande depuis le sommet européen de 1997. Depuis cette date, l’extrême gauche n’avait jamais réussi à mobiliser plus que quelques centaines de personnes à la fois. Cependant, dans le cas de cette manifestation contre Israël, des milliers de gens sont soudain descendus dans la rue, et la plupart d’entre eux ne sympathisaient pas avec la gauche radicale. Des militants et des organisations qui habituellement se détestent ont protesté au coude à coude. Les Loups gris (1), le PKK (2) et DHPK-C (3) de Turquie, par exemple. Comme toujours, la haine des Juifs a servi de ciment pour unir les extrémistes de l’éventail politique.
Des héros antisémites L’antisémitisme s’est manifesté de multiples façons lors de ce rassemblement. Des milliers de gens ont crié des slogans antisémites comme « Sieg Heil », « Hitler Hitler ». Des héros antisémites ont été acclamés comme Ben Laden et Saddam Hussein. Certains portaient des T-shirts avec l’effigie de Ben Laden et des organisations antisémites ont été acclamées : de très nombreux manifestants ont crié « Hamas, Hezbollah, Djihad » et « Hamas, Hamas, il faut gazer tous les Juifs. » Un panneau proclamait : « Hitler en a oublié un : Sharon » tandis que, dans la vieille tradition antisémite, de nombreux slogans dénonçaient Sharon comme un tueur d’enfants et de bébés. D’innombrables pancartes ou slogans comparaient l’Allemagne nazie et Israël. Des montages photos montraient Hitler tapant sur l’épaule de Sharon ou Sharon affublé de la moustache de Hitler. « Hitler a un fils : SSharon », « Arrêtez Adolf Sharon », « Boycottez ISSraël, boycottez SSharon », « Les Juifs sont des nazis » et « Israël = État nazi », tels étaient certains des slogans. Toutes les combinaisons possibles de la svastika et de l’étoile de David étaient présentes, entrecoupées de signes « égale » ou « plus petit que ». Au total, nous avons compté plus de 75 svastikas. Les manifestants criaient « Les Juifs sont des nazis » et accusaient Israël de vouloir une « nouvelle Shoah ». « Arrêtez l’Holocauste des Palestiniens », « Jenine 2002= Varsovie 1943 », « Auschwitz, Srebrenica, Gaza », « Anne Frank vit maintenant à Gaza. »

Juden raus
Non seulement Israël était visé, mais aussi tous les Juifs. « Les Juifs à la mer », « Les Juifs sont des chiens », « Juden raus » (Les Juifs dehors) « Sharon terroriste, à bas les Juifs », et « Je vais devenir antisémite, pas vous ? » Beaucoup chantaient en arabe une promesse faite par le prophète Mahomet de tuer en masse les Juifs. Les manifestants brandissaient des cartes du Moyen-Orient où l’État d’Israël avait été effacé. Certains criaient : « La Palestine aux Palestiniens » et « Sharon, retourne en Pologne ! » De nombreux manifestants invoquaient le nom d’Allah et associaient les États-Unis et Israël à Satan. « Israël est le Royaume du Mal », proclamait une pancarte. Ceux qui admiraient les auteurs des attentats suicides criaient : « Nous nous sacrifierons pour notre pays en donnant notre sang et notre âme. » Certains manifestants portaient des armes en plastique, d’autres de faux explosifs autour de leur ceinture. Une bombe incendiaire fut lancée contre une boîte de nuit homosexuelle aux cris de « Gays, gays » et plusieurs bars gays furent bombés ou souillés. Ces actes n’avaient pas de caractère antisémite mais exprimaient plutôt l’hostilité des groupes religieux fondamentalistes contre les homosexuels.

Incendies criminels
Depuis le début d’avril, les Juifs sont de plus en plus confrontés à l’antisémitisme dans la rue. A l’un on a dit : « Les Juifs, faudrait tous les tuer », à un autre on a crié : « Sharon Hamas » en faisant le salut hitlérien. Un homme a été interpellé dans un jardin public et on lui a demandé : « T’es juif,toi ? Moi, je suis un ami de Hitler », tandis qu’un autre lui lançait : « Faudrait parquer tous les Juifs derrière des barbelés. » Un petit garçon juif qui demandait où se trouvait son frère s’est vu répondre : « Dans une chambre à gaz. » Des expressions telles que « salauds de Juifs » et « Hamas, Hamas, faut gazer tous les Juifs » sont couramment employées. Une équipe de football d’Amsterdam a été récemment suspendue pour avoir tenu des propos antisémites et fait le salut hitlérien. Depuis le 11 septembre 2001, les crimes antisémites ont augmenté dans toute l’Europe. Au mois d’avril 2002, les choses ont encore empiré. En France, 360 agressions antisémites ont eu lieu, rien qu’au cours de la première quinzaine d’avril.
Mais l’Angleterre, l’Allemagne, la Belgique, l’Italie et les Pays-Bas offrent également un terrain favorable à l’antisémitisme. Si l’on parcourt rapidement les journaux européens on se rend compte que, depuis le début d’avril, au moins quinze attentats ou agressions violentes ont été répertoriés contre des synagogues, des dizaines de cimetières et de monuments juifs, deux écoles juives, un boucher casher, un club sportif, une librairie, un centre communautaire et un bus scolaire transportant des enfants. Plusieurs bâtiments ont été incendiés. Des voitures appartenant à des Juifs ont été incendiées, des Juifs ont été tabassés dans les rues, et des slogans antisémites sont apparus dans de nombreux endroits.

Eric Krebbers et Jan Tas

Notes du traducteur

1. Loups gris (ou Bozkurt) : milices de combat dirigée par le colonel Turkes mort en avril 1997 et enterré par toute la classe politique turque à l’exception des responsables kurdes et des intellectuels turcs de gauche. Si les Loups gris ont connu leur heure de « gloire » entre 1963 et 1980 - leur Führer fut même vice premier ministre entre 1975 et 1978 -et s’ils assassinèrent des centaines de journalistes libéraux, de syndicalistes, leur activité ralentit entre 1980 et 1987 à cause de l’hostilité d’une partie de l’armée. Depuis ils ont repris du service, mais surtout dans le Kurdistan où les Loups gris appartiennent à des unités spéciales qui terrorisent la population kurde. Si le parti de Turkes n’a pas réussi à avoir de députés élus sous son étiquette, plusieurs de ses militants se sont fait élire sur les listes de l’ANAP de Mesut Yilmaz et le DYP de Tansu Ciller.
2. PKK (Partiye Karkaran i Kurdistan, Parti des Travailleurs du Kurdistan), aujourd’hui KADEK, Congrès pour la liberté et la démocratie au Kurdistan. Parti nationaliste dirigé par Abdullah Ocalan jusqu’à l’enlèvement de celui-ci en février 1999 par un commando turc au Kenya. En Turquie, ce parti « marxiste-léniniste » recrute parmi des bergers, des ouvriers, des travailleurs agricoles et des chômeurs qui sont formés à la guérilla à l’étranger, autrefois au Liban, maintenant dans le nord de l’Irak, en Iran et en Arménie.
1. DHKP-C (Front-Parti Révolutionnaire de Libération) : groupe mao-stalinien turc issu de Dev Sol (Gauche Révolutionnaire, groupe de guérilla maoiste des années 60). Il mène la guérilla contre l’État turc mais une grande partie de ses cadres et militants sont en ce moment sous les verrous. Ils ont organisé de nombreuses grèves de la faim à l’intérieur et à l’extérieur des prisons contre la répression dont ils sont victimes. Ils n’hésitent pas à liquider leurs opposants et considèrent les anarchistes et les communistes non autoritaires comme des traîtres.