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Le Venezuela en noir et blanc ? (2003)

Sous ce titre le site Indymedia présente une photo mettant face à face deux Vénézuéliens. Tous deux, on le suppose, discutent de leurs désaccords par rapport au président Chavez.

Article mis en ligne le 1er mai 2017

Jusque-là, rien de très surprenant. Par contre, le journaliste nous inflige une longue page de dissertations risibles sur le Venezuela qui serait divisé entre 80% de « Noirs » pro-Chavez et 20% de « Blancs » anti-Chavez. Outre que ces chiffres ne correspondent pas aux résultats électoraux obtenus par Chavez, ce « journaliste » fait preuve d’une crédulité inquiétante et d’une ignorance crasse quand il prétend que le Venezuela serait divisé entre « Noirs » et « Blancs ».

En effet, la population véritablement noire est minoritaire et son statut social est loin d’être aussi valorisé que le prétend l’auteur de l’article. La plupart des Vénézuéliens sont ce que nous appellerions en France des métis, mais
1) ils ne reconnaissent pas le métissage comme une valeur positive,
2) ils se considèrent généralement beaucoup plus proches des Blancs (y compris des conquistadors espagnols) que des Indiens ou des ex-esclaves noirs.

La stratégie matrimoniale des femmes et des hommes au Venezuela est de « blanquear la raza » (blanchir la race = se marier avec quelqu’un de Blanc ou en tout cas de moins « typé » que soi) parce que la plupart des Vénézuéliens ne sont pas fiers de leurs origines indiennes ou africaines, contrairement à ce que raconte l’auteur de l’article.

Sur le fond, le niveau politique de cet article sombre encore d’un degré dans le ridicule quand il explique que le gouvernement Bush préfère les Blancs du Venezuela aux fantomatiques Noirs. Apparemment ce monsieur ne sait pas que Condoleeza Rice et Colin Powell, les deux principaux dirigeants de la po-litique étrangère américaine, sont Noirs et qu’ils ne se déterminent pas sur la couleur de la peau de leurs interlocuteurs vénézuéliens mais sur les intérêts de classe qu’ils défendent.
Cet article ne mériterait même pas d’être mentionné s’il ne reflétait pas, de façon symptomatique, le recul « théorique » des milieux dits « contestataires ». Il fut une époque où un journaliste gauchiste aurait fait au moins allusion aux classes sociales, quitte à mentionner une fantasmatique bourgeoisie compra-dore et la bourgeoisie nationale. Aujourd’hui on est descendu encore d’un cran : la lutte des races a remplacé la lutte des classes ! Pourra-t-on tomber en-core plus bas ?
Y.C., novembre 2003