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Azam Kamguian : Islamisme et multiculturalisme

Pour bien comprendre la portée et le contexte de cet article, il faut savoir qu’au Canada, depuis 1991, les chrétiens et les juifs peuvent faire appel à un tribunal d’arbitrage issu de leur « communauté » pour régler des contentieux commerciaux, professionnels et familiaux. Les décisions de ces tribunaux sont « définitives et obligatoires ». Les islamistes canadiens jouent donc sur du velours en accusant l’Etat de « racisme », de « discrimination », « d’islamophobie », etc., et en exigeant les mêmes droits pour chaque « communauté ». C’est pourquoi c’est la logique même du communautarisme (ou du multiculturalisme comme disent les Anglo-Saxons) qu’il faut dénoncer, même et surtout si elle se pare d’un prétendu « respect » des religions. Cela suppose donc de défendre ouvertement, sans aucun complexe, les valeurs de l’athéisme et le primat de la raison sur les superstitions, qu’elles que soient la forme sophistiquée que celles-ci adoptent, de Teilhard de Chardin aux sectes New Age, en passant par la théologie de la libération, le fondamentalisme protestant ou l’intégrisme juifs. (Ni patrie ni frontières.)

Article mis en ligne le 1er mai 2017

(Ce texte résulte de l’adaptation de deux interventions de l’auteure lors d’un débat sur « Les tribunaux islamiques et les droits des femmes au Canada », le 7 mars 2004 à Toronto et au cours d’un séminaire sur la commémoration de la journée internationale des femmes, le 14 mars 2004 à Birmingham.)

Aujourd’hui, je vais vous expliquer pourquoi je suis opposée aux tribunaux islamiques et comment la charia viole les droits des hommes et des femmes. J’essaierai également de démontrer comment l’islamisme et le multiculturalisme travaillent de conserve contre les droits humains universels au Canada. Pour terminer, j’insisterai sur l’importance de supprimer les tribunaux islamiques dans ce pays.

Comme nous pouvons le constater aujourd’hui, les islamistes ont récemment créé un Institut islamique de justice civile pour superviser, sur la base de la loi islamique, les tribunaux qui rendraient des jugements concernant des conflits familiaux et autres litiges concernant le droit civil entre des personnes d’origine musulmane. C’est la première fois qu’un pays occidental reconnaît la moindre validité aux principes moyenâgeux de la charia. Il n’est pas difficile d’imaginer que les islamistes se serviront de cette reconnaissance comme d’une arme pour essayer d’étendre de telles mesures à d’autres pays. Après tout, si le Canada est préparé à reconnaître la loi islamique, pourquoi ne serait-ce pas le cas de tous les autres Etats occidentaux ?

Cette innovation juridique représente une nouvelle tentative des islamistes d’imposer une loi barbare, la charia, mais cette fois aux peuples vivant en Occident. Elle a été soutenue par les militants de l’islam politique, une force importante qui a brutalement éliminé les droits et la liberté du peuple en général - et les droits des femmes au Moyen-Orient, en particulier. Cette tendance politique s’est mobilisée contre les mouvements laïcs et progressistes pour la libération et l’égalité au Moyen-Orient. En Iran, au Soudan, au Pakistan et en Afghanistan, les régimes islamiques ont commencé à transformer les maisons des femmes en prisons : leur confinement, leur exclusion de nombreuses activités professionnelles et éducatives, et leur traitement brutal ont été entérinés par la loi de ces pays.

Il est triste de constater que la création de tribunaux islamiques au Canada sera malheureusement justifiée par la politique réactionnaire du multiculturalisme. Elle est le fruit d’une politique qui provoque la fragmentation des citoyens, un système juridique fondé sur la ségrégation et le racisme. Bien sûr, cette politique de fragmentation et de ségrégation convient parfaitement aux islamistes. M. Mohamed El Masry, président du Congrès canadien des musulmans, prétend que le Canada a besoin d’une « multiplicité de lois » pour s’adapter aux différentes communautés quand leurs critères moraux entrent en conflit avec ceux des autres groupes. M. El Masry affirme que les tribunaux incluant des imams, des anciens et des juristes, permettront aux musulmans de régler leurs disputes civiles, en respectant leurs croyances religieuses, et sans avoir recours aux tribunaux canadiens laïcs.

Les partisans des tribunaux islamiques affirment que l’un des avantages des sociétés libres et ouvertes de l’Occident est leur flexibilité. Mais cette même « flexibilité » fournit aux islamistes l’occasion et le moyen d’imposer leurs règles rigides et oppressives à une communauté spécifique. M. Momtaz Ali, président de la Société canadienne des musulmans, et farouche défenseur des tribunaux islamiques, a déclaré : « Il (le tribunal islamique) offre non seulement un grand éventail de choix, mais il montre le véritable esprit de notre société multiculturelle. »

C’est le même Momtaz Ali qui a dit : « Sur le plan religieux, le musulman qui choisirait de renier sa foi (...) serait coupable d’un crime bien plus grave que la simple violation d’un contrat - il serait coupable de blasphème ou d’apostasie. » Comme vous le savez, le blasphème et l’apostasie font partie des pires crimes pour l’islam, et sont punis de mort dans de nombreux pays.

Cette innovation juridique s’oppose à l’égalité de tous les citoyens devant la loi, quel que soit sa race, sa religion ou son genre. La charia ne reconnaît pas une telle égalité. Les tribunaux islamiques établiront effectivement un système juridique parallèle fondé sur la religion, et cela mènera à un système juridique fondé sur la ségrégation. Les principes de la liberté individuelle et de l’égalité devant la loi doivent toujours prendre le pas sur toute revendication collective avancée par les membres d’un groupe particulier pour eux-mêmes.

De nombreuses personnes d’origine musulmane feront l’objet de pressions pour qu’elles acceptent l’arbitrage de l’Institut musulman de justice civile sur des questions concernant le droit civil et le droit familial. Cette nouvelle mesure menace les droits des femmes vivant au Canada. Les décisions du tribunal islamique seront définitives, contraignantes et jugées fondées par les tribunaux canadiens. L’Institut musulman de justice civile appliquera la charia, loi islamique opposée à l’impartialité de tous les systèmes juridiques. Par exemple, le témoignage d’une femme ne compte que pour la moitié de celui d’un homme.

Donc, en cas de désaccord entre un mari et sa femme, c’est le témoignage de l’époux qui en principe prévaudra. Pour ce qui concerne les questions d’héritage, alors que, dans la loi canadienne, les fils et les filles sont traités de manière égalitaire, selon la charia, les filles ne recevront que la moitié de ce que recevront leurs frères. Si l’Institut musulman de justice civile devait intervenir en matière de garde d’enfants, l’homme aurait automatiquement la garde dès que sa progéniture aura atteint un âge compris entre 7 et 9 ans.

Etant donné cette inégalité de traitement, il est particulièrement scandaleux qu’aucun droit d’appel devant les tribunaux canadiens n’ait été prévu par la nouvelle loi. En effet, le principe qui a été adopté est le suivant : si les deux parties en conflit se sont volontairement soumises à un arbitrage islamique, celle qui perd devant cette cour ne peut remettre la décision en question.

Tout le problème repose sur le mot « volontairement ». De nombreuses femmes d’origine musulmane résidant en Occident vivent encore dans un environnement islamique et patriarcal où priment la parole de l’homme et les pressions de la communauté. Il faut énormément de courage à une femme pour défier son mari, et pour refuser que leur conflit soit arbitré par la loi islamique. En effet, son refus sera considéré comme une manifestation d’hostilité envers la religion musulmane ou même assimilé à l’apostasie.

A cela s’ajoute une difficulté supplémentaire : porter l’affaire devant un tribunal canadien prendra plus de temps et coûtera davantage. Il n’y a cependant aucune raison pour que les femmes n’aient pas recours à l’arbitrage des tribunaux laïcs canadiens. Le danger est que, une fois les tribunaux islamiques mis en place, les personnes d’origine musulmane seront incitées à y avoir recours, et seront donc privées de nombreux droits pour lesquels les peuples occidentaux ont combattu pendant des siècles.

Dans pratiquement chaque pays occidental comprenant une minorité musulmane significative, les islamistes font pression pour que l’on sépare le droit civil et le droit pénal. Ils cherchent à créer leur propre Etat pour opprimer les gens, légalement et officiellement. Mais il ne doit pas y avoir un Etat dans l’Etat. Pourtant c’est précisément l’objectif poursuivi par les militants islamistes. Ils prétendent que c’est leur devoir de bons musulmans d’œuvrer dans ce sens. Et cet objectif conduira à augmenter le nombre de mariages forcés, de crimes « d’honneur », d’écoles islamiques, de mutilations sexuelles clandestines, il augmentera le harcèlement et l’intimidation dont sont victimes les jeunes filles et les femmes dans les ghettos.

Dans l’Islam, comme l’explique M. Momtaz Ali, il n’existe pas de séparation entre le droit et la religion. Mais dans la civilisation contemporaine, les lois sont considérées comme l’œuvre de l’homme et, en tant que telles, elles peuvent être changées à la lumière de l’évolution des circonstances. L’islam oppose la charia aux droits universels des femmes et des hommes, mais comme c’est la loi de Dieu, tout changement est impossible.

La charia s’oppose à toute personne qui croit dans l’universalité des droits humains, les droits civiques et la liberté individuelle des femmes, la liberté d’expression, la liberté de religion et de croyance, et la liberté de ne pas croire. La loi islamique s’est développée durant les premiers siècles de l’Islam et a intégré des coutumes et des traditions tribales, pré-islamiques et misogynes du Moyen-Orient. Comment une loi dont les éléments fondamentaux ont été mis en place il y a plus de mille ans pourrait-elle être encore applicable au XXIe siècle ? La charia ne reflète que les conditions sociales et économiques de l’époque des Abassides(1) et elle s’est développée en ignorant toute l’évolution des droits humains, sociaux, économiques, culturels et moraux. Les principes de la charia sont fondamentalement opposés au progrès moral humain et aux valeurs de la civilisation.

La loi islamique s’oppose absolument à la liberté de pensée, à la liberté d’expression et à la liberté d’action. Les accusations d’impureté, d’apostasie servent à faire taire toute voix dissidente. L’oppression et l’injustice façonnent les vies de toutes les personnes qui tentent d’avoir un esprit libre. Quelqu’un, qui est né musulman et considéré comme tel, est forcé de le rester jusqu’à la fin de ses jours. La loi islamique nie les droits des femmes et des minorités religieuses non musulmanes. Les non-croyants ne bénéficient d’aucune tolérance : ils doivent mourir ou se convertir. Les juifs et les chrétiens sont traités comme des citoyens de seconde classe. Pendant les deux dernières décennies, des millions de gens ont été victimes de la charia : des centaines de milliers ont été exécutés, décapités, lapidés, mutilés, fouettés, bombardés et chassés de chez eux. Dans les pays qui ont proclamé un Etat islamique, comme l’Iran, le Soudan, le Pakistan, certains Etats du nord du Nigeria et en Afghanistan, nous avons déjà pu constater les effets pernicieux de la charia.

Les droits de l’homme et la charia sont définitivement et irrémédiablement inconciliables et antagonistes. Les droits humains universels sont essentiels pour assurer un certain niveau de vie aux habitants de la planète. On ne peut laisser les gouvernements et les autorités tolérer sévices et mauvais traitements en utilisant comme excuse le multiculturalisme. Nous ne pouvons laisser le multiculturalisme devenir le dernier refuge de la répression. Accepter que la religion serve à justifier le viol des droits de l’homme, c’est entériner une discrimination des victimes et leur faire savoir qu’elles ne méritent pas d’être protégées.

Le multiculturalisme ne sert qu’à dissimuler la mise en place d’un système global de ségrégation sociale, juridique, intellectuelle, émotionnelle et civile, système fondé sur des distinctions de race, d’ethnie, de religion et de genre. Ce système ségrégationniste attaque les droits fondamentaux et la liberté des femmes et justifie la domination misogyne imposée aux femmes par les islamistes. Toute tentative de restreindre les droits des hommes et des femmes au nom de la religion et de la culture, ou toute tentative de définir la liberté et l’égalité selon des critères fixés par des cultures et des religions différentes n’est que l’expression du racisme.

Notre société contemporaine est beaucoup plus vaste, diversifiée et complexe que la petite société tribale et primitive qui existait en Arabie il y a 1400 ans et où est né l’islam. Il est temps d’abandonner l’idée que tout le monde devrait vivre sous la charia. Plus que jamais, les individus ont besoin d’un Etat laïc et d’une société laïque qui respectent la liberté religieuse, mais aussi la liberté de ne pas croire, et les droits humains fondés sur le principe que le pouvoir appartient au peuple et non à Dieu. Il est vital de combattre la loi islamique et d’obliger l’islam à se soumettre à la laïcité et à des Etats laïques.

J’appelle toutes les forces laïques et les partisans de la liberté à se lever et à protester contre la création de tribunaux islamiques au Canada. Tous les progressistes devaient s’unir pour stopper l’islamisme et la politique multiculturaliste des autorités canadiennes qui viole les droits humains universels et nos valeurs civilisées.

Azam Kamguian

(Traduit par Ni patrie ni frontières)

(1) Abbassides : troisième dynastie des califes sucesseurs de Mahomet. Si elle a duré officiellement de 762 à 1258, son âge d’or ne couvre que les VIIIe et IXe siècles, à l’époque où Bagdad était un des principaux centres de la civilisation mondiale. Géographiquement les abbassides ne contrôlèrent ni l’Espagne ni l’Afrique du Nord (uniquement, de façon purement formelle, la Tunisie et l’est de l’Algérie). (N.d.T.)